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Splendeurs et misères de la règle "Show, don't tell"

 
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Tybalt



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MessagePosté le: Mar Mar 02, 2021 9:30 pm    Sujet du message: Splendeurs et misères de la règle "Show, don't tell" Répondre en citant

J'ouvre un fil sur cette règle, ses origines, ses promoteurs, ses détracteurs, ses avantages, ses limites, son but, sa vie, son oeuvre, etc. parce que c'est un sujet qui semble revenir assez souvent par ici.

Je copie-colle ici quelques messages venus du fil consacré à Chroniques du Pays des Mères d'Elisabeth Vonarburg :

theyoubot a écrit:
Soleil* a écrit:
Je n'aime pas trop non plus la présentation sous forme principalement de journaux intimes, l'idée est bonne et on y gagne à avoir des synthèses des évènements faite par les différents personnages, mais on y perd en "spontanéité", je ne sais pas trop comment le dire mais en gros je préfère un dialogue à une lettre racontant le dialogue en question, c'est plus vivant.

Je fais partie des gens qui croient à une célèbre règle d'écriture, 'Show, Don't Tell', règle érigée en règle d'or par quelques grands écrivains et appliquée par quasiment tous : on ne raconte pas un évènement ou un dialogue au lecteur via un narrateur interne, on les fait vivre au lecteur en direct.
Un récit est il meilleur s'il respecte cette règle ? Je l'ignore. Mais il est plus vivant, plus prenant, plus émouvant. Le lien empathique avec le/la protagoniste est plus fort. Tous ces avantages expliquent, entre autres, qu'il est difficile d'écrire un bon roman épistolaire.

Mais les avantages du Show Don't Tell ont une lourde contrepartie : c'est bien plus dur à écrire. Entrelacer les émotions du protagoniste dans un évènement décrit en direct. Montrer les émotions, leur donner une dynamique naturelle dans le timing d'une scène, c'est beaucoup de travail.. La qualité, ça se paie.

Certes, je connais quelques romans bons en dépit d'un non respect du Show Don't Tell.
- ils sont rares
- rien ne dit qu'ils n'auraient pas été encore meilleurs s'ils avaient respecté la règle du Show Don't Tell. Des Fleurs pour Algernon existe sous les deux formes. Vous pouvez vous faire un avis. J'ai lu les deux versions. Mon avis est fait.
Donc, à ceux qui m'objectent avoir adoré 'Chroniques du Pays des Mères', je répond : vous l'avez aimé grâce à la narration interne ou en dépit d'elle ?

À part ça, hélas Ö Grand Hélas, j'ai lu une palanquée de romans ennuyeux à cause d'un abus de narration interne.

Comme d'autres caractéristiques * nuisant au plaisir de certains lecteurs (une partie des lecteurs ? La majorité ?), la narration interne permet par contre d'écrire beaucoup plus vite. C'est un raccourci commode pour un romancier. Cela semble être la motivation de beaucoup d'infractions au Show Don't Tell. Cette question est revenue plus fréquemment sur des forums littéraires avec une nouvelle génération de lectrices post ado nourries de "sagas" bit lit & co écrites très vite à coups de narration interne et pour lesquelles, parfois, narration interne rime avec empathie. Au point que j'ai du mentionner la narration interne dans mes derniers sondages qualité.

*Photo d'avatar de Lisbeï (la forumiste, pas le personnage du roman)*

Par une étrange coïncidence, Lisbeï est à la fois un personnage de ce roman et une membre de ce forum qui est insensible à ce défaut. Donc ce n'est peut être pas une coïncidence.


* Des défauts qui rendent un roman plus facile à écrire

- fragmentation de points de vue, récit choral

- Évolution du personnage : discussion ici entre Hoel et moi.


Tybalt a écrit:
theyoubot a écrit:
Je fais partie des gens qui croient à une célèbre règle d'écriture, 'Show, Don't Tell', règle érigée en règle d'or par quelques grands écrivains et appliquée par quasiment tous : on ne raconte pas un évènement ou un dialogue au lecteur via un narrateur interne, on les fait vivre au lecteur en direct.
Un récit est il meilleur s'il respecte cette règle ? Je l'ignore. Mais il est plus vivant, plus prenant, plus émouvant. Le lien empathique avec le/la protagoniste est plus fort. Tous ces avantages expliquent, entre autres, qu'il est difficile d'écrire un bon roman épistolaire.


Cette "règle" est une formule anglo-saxonne des plus récentes, largement surestimée et surinterprétée. Qu'on ait des avis en tant que lecteur ou lectrice, oui, bien sûr, mais de là à s'accrocher à quelques règles et à en faire des principes d'écriture pour tenter de prendre les écrivains en faute, il y a un pas trop vite franchi et dont je me garderai bien, car il mène surtout à une palanquée de contresens et de mauvais procès. Mieux vaut déclarer : "mes goûts font que...", c'est plus prudent que de prétendre expliquer à l'auteur ce qu'il aurait dû faire. (Je précise que je ne dis pas ça pour toi : c'est une critique que je retrouve souvent, trop souvent, sur les forums.)

On pourrait ouvrir un fil entier sur cette "règle" d'écriture et (surtout ?) sur la façon dont on croit en repérer l'application ou la non application dans tel ou tel livre. En vérité, les choses sont complexes et il y a toutes sortes de façon de tordre le cou à cette règle sans tomber dans les défauts dont tu parles... et, au contraire, tout un tas de façons de l'appliquer en ayant l'air d'y tomber (alors que non).

Revenons en aux Chroniques du Pays des Mères. Les échanges épistolaires ne sont présents que dans la première partie (ou les deux premières sur cinq, je ne sais plus). Ils ont visiblement un rôle d'exposition : permettre d'introduire des éléments-clés et des personnages de l'univers que Lisbeï, encore enfant à ce moment, ne peut pas percevoir. Cette exposition est faite de manière très vivante, en nous plongeant directement dans un échange savant entre plusieurs personnes liées à la fois par des relations de collaboration scientifique et par des liens affectifs forts, parfois amoureux, parfois des ex, etc. Le résultat donne des lettres denses, qui participent à une intrigue ficelée serré, qui avance vite. S'il y a des "ventres mous" ou des moments moins vivants dans ce livre, je ne les placerais pas là.

Le journal intime de Lissbeï, lui, est redoutablement bien utilisé, car, sous couvert d'être un simple compte-rendu d'événements "moins vivants qu'une vraie scène", il ajoute au contraire un niveau de lecture supplémentaire en nous plaçant derrière l'épaule du personnage qui livre sa compréhension de tel ou tel événement. Résultat : mécaniquement, on est invité à se demander si le personnage a bien compris ce qui se passait et s'il n'y a pas de malentendus avec les autres personnages. Ce genre de questionnement côté lecteur pourrait s'introduire autrement, mais le fait de montrer un personnage en train de raconter après coup et de s'interroger sur le sens de ce qui s'est passé est un moyen très efficace de nous inviter à prendre, à notre tour, de la distance critique par rapport à ses conclusions.
Et de fait, plus on avance dans le roman, plus on se trouve confronté à des situations où Lisbeï lutte pour comprendre les autres et pour se comprendre elle-même, ce qui est d'ailleurs matérialisé par les moments de ratures, les choses qu'elle pense mais n'écrit pas, etc.
Dans ce type de passage, comment délimiter le "show" et le "tell" ? Difficilement, et c'est fait exprès ! On pense être dans le "tell" parce qu'on a un personnage qui semble transparent, qui semble n'être là que pour servir de témoin à une scène racontée de manière indirecte... et en réalité on est en plein dans le "show" puisqu'on voit assez vite que ce personnage n'est "pas fiable" ou du moins pas transparent : Lisbeï comprend les choses d'une certaine manière, mais il y a des détails qu'elle ne remarque pas, d'autres qu'elle néglige ou comprend de travers, ou qu'elle surinterprète à cause de ses émotions, etc. Bref, on la voit se débattre avec elle-même. C'est tout sauf un discours indirect plat.
On peut bien sûr être plus ou moins convaincu par ce procédé, mais en termes de maîtrise technique de la narration, c'est complexe, c'est savant et c'est pensé de manière approfondie.


theyoubot a écrit:
Tybalt a écrit:
Cette "règle" est une formule anglo-saxonne des plus récentes, largement surestimée et surinterprétée. Qu'on ait des avis en tant que lecteur ou lectrice, oui, bien sûr, mais de là à s'accrocher à quelques règles et à en faire des principes d'écriture pour tenter de prendre les écrivains en faute, il y a un pas trop vite franchi et dont je me garderai bien, car il mène surtout à une palanquée de contresens et de mauvais procès.

anglo-saxonne : c'est un principe universel suivi par les auteurs de toutes les nationalités. Et ce pour de très bonnes raisons. Voir mon précédent message.
des plus récentes : un siècle.
Thekhov a dit en substance 'Ne m'informez pas que la lune brille, décrivez moi le reflet de sa lueur sur un verre brisé'


Voici comment tu présentes la chose : quelqu'un cherche un prétexte pour descendre un roman, trouve "quelques règles ou principes d'écritures" que le récit ne respecte pas, et s'écrie "AH AH mauvais roman !!"
Dans la réalité, c'est exactement l'inverse qui se passe. La règle du Show Don't Tell n'a pas jailli du néant mais de mauvais romans. S'il y avait une "chronologie", ce serait la suivante :

1 - Généralement, la narration interne affaiblit l'émotion transmise au lecteur et l'immersion du lecteur dans le récit.

2 - Le but de la quasi totalité des auteurs est de créer un récit immersif, de procurer au lecteur évasion et émotions

3 - la plupart des récits sont donc écrits sans narration interne

Bref, le Show Don't Tell n'est une règle à la mode parmi d'hypothétiques Maîtres à Penser du Bon Goût littéraire, car ils n'existent pas. Le Show Don't Tell est la reconnaissance d'un besoin fondamental des lecteurs. Les auteurs respectent le Show Don't Tell non pas par manque de lucidité ni par servilité stupide face à des Principes surfaits publiés dans un Manuel-Du-Parfait-Romancier. Ils respectent le Show Don't Tell parce que ça augmente le plaisir de leurs lecteurs.

Bien que la narration interne soit mieux gérée dans Chroniques du Pays des Mères que dans, mettons, Au Service Surnaturel de sa Majesté, les inconvénients du procédé demeurent.


Merci pour ton avis sur ce roman. Je le trouve détaillé et très intéressant.


Tybalt a écrit:
Un siècle, c'est très récent à l'échelle de l'histoire littéraire *Smile* Bon, le sujet mériterait vraiment un fil à part entière, puisqu'il dépasse largement le cas de ce roman.


theyoubot a écrit:
Tybalt a écrit:
Un siècle, c'est très récent à l'échelle de l'histoire littéraire

Mais c'est 99 % de la période où elle a été un média grand public. Donc c'est plus que suffisant pour juger ce qui procure du plaisir aux lecteurs et les standards de narration qui en ont découlés

Tybalt a écrit:
le sujet mériterait vraiment un fil à part entière

Lisbei et moi en avons longuement débattu ici. C'était il y a 7 ans. Depuis, j'ai eu le temps de mûrir mon avis sur la question. Je suis certaine aujourd'hui que Lisbei est insensible à cette caractéristique (*), au moins à l'occasion.
Toi aussi, évidemment. Mais cela m'étonne moins dans ton cas. Nous sommes trop différentes toutes les deux. Ton insensibilité aux qualités de rythme, ta croyance que la situation actuelle de la SF française par rapport à la SF anglo saxonne n'est pas une simple affaire de talent etc.


* je peux imaginer différentes raisons pour cela


Voir aussi la discussion plus ancienne au sujet du roman Un océan de pavots d'Amitav Ghosh.
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Tybalt



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MessagePosté le: Mar Mar 02, 2021 9:53 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Donc ! Qualifier les gens d'insensibles, c'est pratique, mais j'ai bien l'intention de contre-attaquer *Razz* en pointant les présupposés ou plutôt les postulats nombreux sur lesquels tu fondes ton esthétique qui érige le "Show, don't tell" en règle d'or :

- tu sembles persuadée que tous les auteurs suivent cette règle, quelle que soit leur nationalité. Hum ! Il me semble pourtant qu'il y a d'énormes différences d'esthétiques selon les cultures et les régions du monde, tout comme il y a des différences de goûts. Ne serait-ce pas simplement les romans que tu lis pour le moment qui proviennent de pays/cultures proches de cette esthétique-là ? Ou bien alors, les livres que tu lis répondent à d'autres principes, que tu ne vois pas parce que tu te focalises sur cette règle-ci (et c'est humain).

- Ton point numéro deux, plus haut, est un postulat fondateur d'une esthétique : "Le but de la quasi totalité des auteurs est de créer un récit immersif, de procurer au lecteur évasion et émotions." C'est une conception possible de la littérature, mais qui souffrirait de nombreux contre-exemples. Tous les auteurs ne se sentent pas nécessairement tenus par ça.

- Tu ne prends en compte que la littérature du dernier siècle en date, avec pour argument que c'est la période pendant laquelle elle est devenue "un média grand public", ce qui a permis de "juger ce qui procure du plaisir aux lecteurs et les standards de narration qui en ont découlés". Aha ! (te répondrai-je.) Mais c'est une conception bien précise de la littérature et des critères qui sont censés en mesurer la qualité. Là encore, c'est une approche possible, mais ce n'est pas une vérité universelle.
En effet, si je te suis bien, tu mesures la qualité d'un roman à son succès populaire immédiat. Tu sembles faire comme si la scène littéraire était une sorte d'arène de concours où chacun pourrait entrer et se mesurer aux autres dans une pure compétition esthétique, avec un principe du "que le meilleur gagne". Mais c'est loin d'être le cas. Le succès populaire d'un roman dépend de tout un tas d'autres facteurs que ses pures qualités littéraires. Un excellent roman peut passer inaperçu pour tout un tas de raisons conjoncturelles (être mal diffusé chez un petit éditeur, passer dans l'ombre d'un autre roman qui bénéficie d'une campagne publicitaire écrasante, etc.) et n'être découvert ou redécouvert que bien plus tard.
Mon avis est que ce tournoi idéal pour l'amour du lectorat est biaisé par beaucoup de choses et qu'on ne peut pas se fonder sur le degré de succès immédiat d'un livre pour en déduire sa qualité.

- On pourrait dire la même chose des lecteurs et des lectrices : tout le monde ne cherche pas la même chose dans un récit, et il y a (ou il y a eu par le passé) des gens qui ne vont pas nécessairement être sensibles à l'évasion ou aux émotions procurées par une lecture, mais davantage à d'autres facteurs. Tu sembles postuler un "besoin universel du lecteur" qui serait commun à tout le monde et que l'on pourrait satisfaire en appliquant une règle elle-même universelle.
Mhm... moi, je pense que les besoins du lectorat varient beaucoup d'un coin du monde à l'autre (et d'un siècle à l'autre) et qu'il n'y a pas de martingale. En revanche, les modes existent, l'impérialisme culturel existe aussi, et il arrive que des gens se laissent imposer leurs goûts, ou se laissent façonner leurs goûts, par d'autres gens, des institutions, etc. Bref, tout lecteur n'est pas un humain hors sol qui exprimerait ses besoins universels librement : les humains vivent dans un environnement rempli de rapports de pouvoir ou d'influence. Un livre médiocre porté par une forte campagne publicitaire peut rencontrer un succès commercial qui va mécaniquement, au-delà d'un certain seuil, attirer la curiosité de plus de gens qui vont l'acheter. Même si beaucoup de gens qui le lisent ne l'aiment pas, le roman restera un succès commercial énorme.
Enfin, quid de l'argument possible de la "majorité silencieuse" ? Beaucoup de gens lisent sans exprimer leur avis sur les livres. Pour généraliser à ce point sur la capacité d'un livre à satisfaire des besoins universels des lecteurs sur toute la planète, il faudrait pouvoir recueillir l'avis détaillé de tout le monde, or même à l'heure du Web 2.0, on en est encore loin. Donc, je pense qu'il vaut mieux rester prudents dans nos conclusions.

Pour approfondir le sujet, je propose deux pistes :

- comparer ce "show, don't tell" à des arts poétiques plus anciens - la Poétique d'Aristote, l'Art poétique d'Horace, celui de Boileau, etc. - et relevant de courants littéraires variés - par exemple, je ne suis pas certain que le Manifeste du surréalisme de Breton ou Pour un nouveau roman d'Alain Robbe-Grillet fassent l'éloge du "show, don't tell".

- Deux épisodes du podcast Procrastination sur Elbakin.net (aussi écoutable sur Soundcloud), qui sont des épisodes de 15 minutes :
=> saison 1 épisode 8 : "show, don't tell".
=> saison 4 épisode 15 : "tell, don't show".

- reparler de la "narration interne" et prendre le temps de la définir ensemble pour voir exactement ce que theyoubot entend par là et comprendre en quoi cela la dérange. (On l'a déjà dit mais de manière un peu dispersée.)

(Ça fait trois pistes, finalement.)
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Hoël
Pygmalion


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MessagePosté le: Mer Mar 03, 2021 6:31 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je ne comprends pas bien l'objet du débat, est-on en train de parler du point-de-vue interne d'un narrateur à la première personne ou d'un narrateur omniscient qui sait tout de ce que pense chaque personnage ou encore de cette narration à ''la troisième personne fortement limitée" chère à Cherryh ou un narrateur externe sait tout ce que pense le personnage principal et seulement lui ?
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Brindargent



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MessagePosté le: Jeu Mar 04, 2021 11:46 am    Sujet du message: Répondre en citant

Bah comme je ne connaissais pas l'expression anglaise, je suis allée voir Wiki et voilà ce que j'ai trouvé:

Citation:
Montrer, ne pas dire est une technique utilisée dans divers types de textes pour permettre au lecteur d'expérimenter l'histoire à travers l' action, les mots, les pensées, les sens et les sentiments plutôt que par l' exposition, la synthèse et la description de l'auteur. Il évite les adjectifs décrivant l'analyse de l'auteur, mais décrit plutôt la scène de manière à ce que le lecteur puisse tirer ses propres conclusions.


J'avoue ne pas trop comprendre non plus le sujet du débat car à partir du moment où l'on raconte une histoire, il y a forcément un narrateur, que ce soit l'auteur ou un personnage. Il faudrait que l'on m'explique comment l'action peut se raconter elle-même ou que l'on me donne des exemples. J'ai bien pensé aux romans de Stephen King dans lesquels l'action semble se raconter elle même, mais dans ses romans, on a souvent le point de vue omniscient.

Cela relève du plaisir de couper les cheveux en quatre, cette affaire.
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theyoubot



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MessagePosté le: Jeu Mar 04, 2021 10:42 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je vais faire court parce qu'il est tard. Développement sur demande




HOEL


Hoël a écrit:
Je ne comprends pas bien l'objet du débat, est-on en train de parler du point-de-vue interne d'un narrateur à la première personne ou d'un narrateur omniscient qui sait tout de ce que pense chaque personnage ou encore de cette narration à ''la troisième personne fortement limitée" chère à Cherryh ou un narrateur externe sait tout ce que pense le personnage principal et seulement lui ?

Faire raconter l'histoire par un personnage. Par exemple, deux personnages s'assoient au coin du feu et l'un des deux raconte à l'autre pendant 50 pages, 100 pages ou plus, des évènements passés. De sorte que ce monologue constitue tout ou partie du roman.

Ce procédé est statistiquement minoritaire aprés 1950. Je dirais à la louche vite fait sur le gas moins de 5 % des récits. Mais Tybalt, toi-même, et d’autres pourront me corriger sur ce chiffre. Vos estimations sont les bienvenues.





BRINDARGENT


Brindargent a écrit:
Cela relève du plaisir de couper les cheveux en quatre, cette affaire.

Quelle différence cela peut faire ? te demandes-tu. Une énorme différence. Quand les évènements sont vécus ‘en direct’ par le lecteur et le protagoniste, la narrateur omniscient a toute latitude pour décrire
- les émotions du protagoniste au fur et à mesure où l’évènement se produit
- l’évènement dans tous ses détails au fur et à mesure où le protagoniste le vit
- le tout avec la ‘tension’ du direct, de la chose vécue à chaud et en première ligne

Quand les évènements sont rapportés ultérieurement à quelqu’un d’autre, cette personne est mise au courant de beaucoup moins de détails sur l’évènement et sur le ressenti du protagoniste. On livre à l’auditeur, et au lecteur à travers lui, une synthèse d’un évènement auquel l'auditeur n'a pas été 'exposé'.

Résultat : dans le premier cas, le récit est généralement plus vivant, plus prenant, plus émouvant. Le lien empathique du lecteur avec le/la protagoniste est plus fort.
Cela explique que la quasi totalité des récits (parus au XX° siècle) sont écrits selon ce procédé. 95 % ? 90 % ? 80 % ? Je suis preneuse de toutes vos estimations.






TYBALD


Tybalt a écrit:
Ne serait-ce pas simplement les romans que tu lis pour le moment qui proviennent de pays/cultures proches de cette esthétique-là ?

3000 romans SFF policier aventures espionnage et romance publiés entre 1950 et 2020.
Je ne suis pas en mesure de discuter l’éventuelle prééminence de telle ou telle préférence d’écriture chez des romanciers antérieurs à 1950. Si tu as des infos sur la question, je suis toute ouïe.


Tybalt a écrit:
Ou bien alors, les livres que tu lis répondent à d'autres principes, que tu ne vois pas parce que tu te focalises sur cette règle-ci (et c'est humain).

Voilà une remarque qui m’a laissée comme deux ronds de flan. Croyais-tu qu’au cours de leurs longues années d’apprentissage, les écrivains professionnels ne développent en tout et pour tout qu’une seule préférence ? Qui serait : me servir de la narration interne/ ne pas m’en servir ?
Ils auraient sans douté aimé qu’il en soit ainsi. Hélas, écrire un roman est incroyablement difficile, un écrivain de talent doit faire des tas de choix artistiques. Le Show Don’t Tell n’est qu’un choix parmi des dizaines d’autres tout aussi cruciaux. Par exemple, j’en décris ici quatre. Bien que ma description ne fasse que survoler ces quatre là, elle fait déjà 5 écrans de haut et je suis quand même frustrée de n'avoir pas pu aborder des facettes importantes de ces règles. Et il y autant à dire sur l’écriture d’un univers immersif, le style, le ton, l’utilisation d’enjeux sociétaux actuels etc Le Show Don’t Tell est la plus simple de toutes ces règles et celle à laquelle l'ensemble des romanciers 1950-2020 donnent la réponse la moins ambigue.


Tybalt a écrit:
Ton point numéro deux, plus haut, est un postulat fondateur d'une esthétique : "Le but de la quasi totalité des auteurs est de créer un récit immersif, de procurer au lecteur évasion et émotions." C'est une conception possible de la littérature, mais qui souffrirait de nombreux contre-exemples. Tous les auteurs ne se sentent pas nécessairement tenus par ça.

Et ceux là peuvent utiliser la narration interne.
De même, ceux d'entre vous qui ne lisent pas pour l'évasion et les émotions ne comprendront pas pourquoi tant de romanciers évitent la narration interne.

Chez les romanciers, j'ai essayé de dénombrer les deux camps (plus haut). Si vous avez une estimation différente, faites nous en part.
Pour le forum, ou les forums en général, je vais supposer que l'écrasante majorité des membres sont derrière moi. Le lien empathique avec le personnage, les émotions du personnage, sont (à ma grande surprise) la première source de plaisir que me rapportent les membres de forums, tous genres confondus.



Tybalt a écrit:
Tu ne prends en compte que la littérature du dernier siècle en date, avec pour argument que c'est la période pendant laquelle elle est devenue "un média grand public", ce qui a permis de "juger ce qui procure du plaisir aux lecteurs et les standards de narration qui en ont découlés". Aha ! (te répondrai-je.) Mais c'est une conception bien précise de la littérature et des critères qui sont censés en mesurer la qualité. Là encore, c'est une approche possible, mais ce n'est pas une vérité universelle.
En effet, si je te suis bien, tu mesures la qualité d'un roman à son succès populaire immédiat. Tu sembles faire comme si la scène littéraire était une sorte d'arène de concours où chacun pourrait entrer et se mesurer aux autres dans une pure compétition esthétique, avec un principe du "que le meilleur gagne". Mais c'est loin d'être le cas. Le succès populaire d'un roman dépend de tout un tas d'autres facteurs que ses pures qualités littéraires. Un excellent roman peut passer inaperçu pour tout un tas de raisons (…)
Un livre médiocre porté par une forte campagne publicitaire peut rencontrer un succès commercial qui va mécaniquement, au-delà d'un certain seuil, attirer la curiosité de plus de gens qui vont l'acheter. Même si beaucoup de gens qui le lisent ne l'aiment pas, le roman restera un succès commercial énorme.

Hélas, tout ça, tout ce que tu dis n'est que trop vrai. On en a l'amère preuve chaque année depuis 20 ans avec les meilleures ventes en France.
Mais en l'occurrence, ce n'est pas un argument. Dans ce topic, on parle d'une façon de raconter un récit à laquelle adhèrent la quasi totalité des récits. Ça dépasse donc le cadre du succès conjoncturel de romans médiocres ou de l’échec conjoncturel de chef d’oeuvres méconnus.
Une telle proportion d'auteurs ne s'impose pas la même contrainte d’écriture par masochisme.


Tybalt a écrit:
- On pourrait dire la même chose des lecteurs et des lectrices : tout le monde ne cherche pas la même chose dans un récit, et il y a (ou il y a eu par le passé) des gens qui ne vont pas nécessairement être sensibles à l'évasion ou aux émotions procurées par une lecture, mais davantage à d'autres facteurs. Tu sembles postuler un "besoin universel du lecteur" qui serait commun à tout le monde et que l'on pourrait satisfaire en appliquant une règle elle-même universelle.
Mhm... moi, je pense que les besoins du lectorat varient beaucoup d'un coin du monde à l'autre (et d'un siècle à l'autre) et qu'il n'y a pas de martingale.

Quand bien même un besoin des lecteurs serait universel, il ne déterminerait qu’une fraction d’un roman. Toute le reste est à écrire. C’est pour ça qu’il n’existe pas de martingale. C’est pour ça qu’il n’existe pas un seul roman mais des dizaines de milliers de romans. D’ailleurs, comme tu le dis, le besoin d’immersion, d’évasion et d’empathie avec un personnage, eux-mêmes ne sont pas présents chez 100 % des lecteurs. Certes, c’est probablement la combinaison la plus populaire de trois ingrédients possibles en littérature mais elle ne touche pas tout le monde.
Voir ici
Et encore, je parle uniquement de la période 1950-2020, de lecteurs occidentaux et de genres largement diffusés. J’ai remarqué par exemple que les lecteurs de littérature classique et de pièces de théatre classiques ont des attentes radicalement différentes. Le style, les sous-textes philosophiques ou sociaux, l’importance historique de l’oeuvre dans son genre/école littéraire etc Un lecteur de ce profil m’a dit l’an dernier qu’il se fichait complètement des émotions du personnage.



Tybalt a écrit:
quid de l'argument possible de la "majorité silencieuse" ? Beaucoup de gens lisent sans exprimer leur avis sur les livres. Pour généraliser à ce point sur la capacité d'un livre à satisfaire des besoins universels des lecteurs sur toute la planète, il faudrait pouvoir recueillir l'avis détaillé de tout le monde, or même à l'heure du Web 2.0, on en est encore loin.

La communauté informelle des auteurs a fait le sondage pour nous. Elle a donné la réponse par écrit. Cette réponse est en clair dans ce qu’ils ont publié. Tu peux contester la pertinence d’une réponse donnée par des millions de professionnels sans en être une toi-même, mais tu ne m’en voudras pas de parier plutôt sur eux.



Tybalt a écrit:
Qualifier les gens d'insensibles, c'est pratique, mais j'ai bien l'intention de contre-attaquer *Razz*

Ah cœur aride, je t'ai cernée. Tu ne m'abuses plus. Être insensible à un critère n'est ni une qualité ni un défaut. C'est notre empreinte digitale de lectrice. Comme A B et C ci-dessous, chacune de nous est sensible à certains critères et insensible à d'autres.


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Brindargent



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MessagePosté le: Ven Mar 05, 2021 11:40 am    Sujet du message: Répondre en citant

Perso, je n'aime pas trop les narrateurs omniscients parce que comme ils savent déjà tout de l'intrigue, ont prévu tous les détails, sont Dieu, je trouve qu'il y a bien souvent moins de suspense et surtout que ce narrateur omniscient adopte très souvent un ton un peu professoral parce qu'il sait, lui, et pas le lecteur. Le narrateur omniscient me semble toujours un peu imbu de son pouvoir quasi divin sur ses personnages et par ricochet, sur le lecteur.
J'aime bien, par contre le point de vue interne, qu'il soit à la première personne ou à la troisième, parce que j'aime bien suivre un personnage, regarder à travers ses yeux et être surpris en même temps que lui par les événements qui se produisent. Bien sûr, encore faut-il que ce personnage ne soit pas détestable.
Une autre solution sympa : alterner les points de vue.
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theyoubot



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MessagePosté le: Ven Mar 05, 2021 8:30 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Brindargent a écrit:
J'aime bien, par contre le point de vue interne, qu'il soit à la première personne ou à la troisième

Je préfère le point de vue intérieur à un personnage. À la troisième personne. Pour moi, c'est la solution qui bénéficie du meilleur des deux mondes
- un lien étroit et en direct avec le personnage
- la possibilité d'establishing shots, d'élargissements ponctuels de point de vue pour décrire des contextes nécessaire à la scène à venir.

J'ai apprécié quelques romans écrits à la première personne. Bien fait, ça passe. Par contre, tout ce que j'ai lu en narration interne monologue (écrit ou oral) a été un échec. Un roman peut s'en remettre s'il est bon par ailleurs, mais ça en constitue alors l'aspect le moins réussi (par rapport aux critères : émotions, suspense, immersion-dépaysement)
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Toonnette
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MessagePosté le: Sam Mar 06, 2021 1:18 am    Sujet du message: Répondre en citant

Bon, je réponds vite fait après avoir lu en diagonale les arguments et je vais essayer de vous donner quelques pistes de réflexions sur plusieurs trucs (je viens de me relire, ça part dans tous les sens, tant pis.)

"Il n'y a pas de martingale", dixit TYB.
C'est vrai, mais un gentil monsieur d'Hollywood, John Truby, a commis un excellent livre pour aider les auteurs à écrire de bons scénarios, d'abord, puis de bons livres ensuite.

D'ailleurs il n'est pas le seul. Vogler, qui se basait sur les travaux de Campbell (qui dataient de 1949), avait tenté de créer une trame globale menant à une histoire efficace. Mais il n'y avait que 12 étapes dans le voyage du héros, qui étaient :

Étape 1 : Le Monde ordinaire
Étape 2 : L'Appel de l'Aventure
Étape 3 : Le refus de l'appel
Étape 4 : La Rencontre avec le Mentor
Étape 5 : Le Passage du premier seuil
Étape 6 : Les épreuves, les alliés et les ennemis
Étape 7 : L’Approche du cœur de la caverne
Étape 8 : L'épreuve suprême
Étape 9 : La Récompense
Étape 10 : Le Chemin du retour
Étape 11 : La Résurrection
Étape 12 : Le Retour avec l'élixir

Ceci a servi de base à... beaucoup trop de récit de fantasy (mais pas que), à commencer par Bilbo le Hobbit. C'est une base honnête, mais tellement vue et revue qu'elle en devient indigeste, les auteurs du genre peinant à se renouveler. (surtout quand on sait qu'il n'existe, en littérature, au théâtre, au cinéma, en poésie, bref, dans les histoires seulement 36 situations dramatiques possibles. Si si.)

Pour ceux qui aiment décortiquer les choses, je conseille donc "L'anatomie du scénario, de John Truby" , et je me permet ici de mettre les 22 étapes clés qu'un écrivain doit avoir approfondi pour écrire une histoire à la fois efficace et intéressante (pour le côté bien raconté, c'est une autre histoire, vu que le style et l'écriture dépendent de chacun).

Citation:
Truby a un principe d'intrigue organique, ce qui implique :

- Chaque événement est en corrélation avec les autres : la suite d’événements a une unité, c’est un ‘tout’.
- Chaque événement est essentiel.
- Les événements semblent émaner du personnage principal, et non imposés par l’auteur.
-Mise en valeur de l’apprentissage, de la notion d’évolution du personnage (en contradiction avec les anciens mythes qui donnaient la part belle à l’action). L’intrigue va en effet obliger le personnage à évoluer (ce qu’il peut réussir à faire, ou pas).

Truby critique vivement les méthodes telles que celles de Vogler, dans lesquelles les étapes du récit sont imposées. Lui propose 22 étapes de travail (et non de récit), des points capitaux à réfléchir en tant qu’auteur afin que votre travail de scénarisation soit ‘organique’ et non mécanique. Vous n’assemblez pas un lego, vous faites évoluer un fœtus.

Les étapes de travail de Truby

Étape 1 : Définir clairement la révélation
Étape 2 : Définir l’univers du récit et la ‘backstory’ du héros
Étape 3 : Définir le besoin et les faiblesses du héros
Faiblesse psychologique
Faiblesse morale
Étape 4 : Définir le désir du héros (objectif)
Degrés du désir
Étape 5 : Choisir un événement déclencheur
Étape 6 : Choisir un ou des allié(s) au héros
Étape 7 : Choisir l’adversaire (et/ou mystère)
« L’Adversaire iceberg »
Étape 8 : Possibilité à étudier : Faux allié/adversaire
Étape 9 : Définir la première révélation : décision et modification du désir
Étape 10 : Imaginer le plan du héros
Étape 11 : Imaginer le plan de l’adversaire
Étape 12 : Confrontez les deux : dynamique du récit
Étape 13 : Utiliser la faiblesse morale du héros : attaque par un allié
Étape 14 : Imaginer une « apparente défaite »
Étape 15 : Définir une deuxième révélation
Étape 16 : Dévoilement (lecteur)
Étape 17 : Dévoilement (héros)
Étape 18 : Créer des scènes clefs : Porte étroite, Fourches Caudines, Vision de la mort
Étape 19 : Mettre en scène la confrontation
Étape 20 : Organiser la révélation du héros
« La révélation de l’adversaire »
Étape 21 : Illustrer la décision morale
Étape 22 : Décrire le nouvel équilibre


J'avoue que n'étant pas chez moi et n'ayant mes bouquins de technique d'écriture sous la main, j'ai joyeusement recopié ces étapes et celles de Vogler sur le site
https://draftquest.fandom.com/fr/wiki/Sc%C3%A9nario_/_Les_22_%C3%A9tapes_de_travail_de_John_Truby

Pour le "Show, don't tell" cela commence à être martelé un peu partout comme une bonne technique d'écriture. Dans certains types de romans, il faut montrer plutôt que dire. Cela ne veut pas dire que le "dire" est à jeter systématiquement.
Parfois un simple "Il pleuvait et Géraldine remonta son col en sortant pour rejoindre sa voiture" est sans doute plus efficace qu'un monologue intérieur de ladite Géraldine qui n'aime pas quand la pluie coule dans son cou. Parce que, franchement, qui aime ça hein ?

Et le "show don't tell" est très long à maîtriser, et alterner le show et le tell, encore plus, afin d'équilibrer un récit. Raconter les émotions du jeune homme qui vient de perdre sa mère par exemple, de son point de vue interne, est toujours plus riche et intéressant que d'en faire une description clinique de l'extérieur. Parce qu'on ne sait pas si il aimait sa mère ou pas. Et que ça peut être intéressant, pour créer de l'empathie, de plonger le lecteur dans l'empathie.

Brindargent évoquait Stephen King. Pour moi, King arrive à mêler subtilement les deux. Il intègre souvent l'environnement dans le tell, mais montre bien les réactions, souvent viscérales de ses personnages. Mais King a développé un style bien à lui, à la fois efficace et imagé, avec des références très précises sur ce qu'il raconte ou qu'il décrit. Ce qui fait sa force au final, car "si c'était vrai ?", est la question qu'on peut se poser souvent en reposant une de ses histoires (pas toutes hein, certains sont très bof et il a du mal avec les fins en général, bref.)

Je viens de lire Le tatoueur d’Auschwitz qui était censé mettre la larme à l'oeil à tout les lecteurs parce que c'est une belle histoire d'amour sur fond de tragédie. Ce fut un beau raté chez moi. Même si la base du récit est vraie, il n'y a que peu d'émotions fortes qui sont décrites dans ce livre (l'homme qui raconte son histoire l'a raconté dans les années 2000, plus de 60 ans après les faits, cela n'aide pas) et en plus ce qui est raconté semble... forcé. Impossible d'entrer dans l'histoire, ou d'éprouver de l'empathie pour les deux héros. Beaucoup trop de tell donc, et peu de "show", ou très forcé et trop effleuré pour que ça soit intéressant.

Bon, j'avais dit que je ferais court, j'espère que ces quelques trucs auront fait avancer le schmilblick.
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MessagePosté le: Sam Mar 06, 2021 11:51 am    Sujet du message: Répondre en citant

Ahem... ni les travaux de Vogler ni ceux de Campbell n'ont pu servir de base à Bilbo, paru en 1937... Après, j'dis ça, j'dis rien...
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MessagePosté le: Sam Mar 06, 2021 12:13 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Je me suis peut être mal exprimé (il était tard), mais les travaux de Campbell se basent, entre autre, sur l'étude de Bilbo *Smile* et non Bilbo qui aurait été écrit suite aux travaux de Campbell.

(je viens de me relire, je n'étais pas claire, pardon).
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Brindargent



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MessagePosté le: Sam Mar 06, 2021 3:52 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Tout cela me fait un peu penser au classique schéma narratif enseigné dans les écoles pour l'écriture d'une histoire :
1 Situation initiale : tout est calme, on plante le décor, on fait allusion à l'époque, éventuellement on présente les personnages
2 Élément perturbateur : quelque chose ou quelqu'un déclenche le début de l'histoire, enclenche l'action
3 Les péripéties : plus elles sont nombreuses et surtout diversifiées, plus le récit est riche
4 Résolution : c'est tout ce qui va permettre de résoudre l'intrigue, de cheminer vers le dénouement
5 Situation finale : retour au calme, histoire finie.
Bon, après, dans un roman, il peut y avoir plusieurs schémas narratifs qui se suivent, s'entremêlent etc.

Ce schéma fonctionne très bien et permet à presque tout le monde d'écrire au moins une nouvelle.
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MessagePosté le: Dim Mar 07, 2021 4:10 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Brindargent a écrit:
Tout cela me fait un peu penser au classique schéma narratif enseigné dans les écoles pour l'écriture d'une histoire :
1 Situation initiale : tout est calme, on plante le décor, on fait allusion à l'époque, éventuellement on présente les personnages
2 Élément perturbateur : quelque chose ou quelqu'un déclenche le début de l'histoire, enclenche l'action
3 Les péripéties : plus elles sont nombreuses et surtout diversifiées, plus le récit est riche
4 Résolution : c'est tout ce qui va permettre de résoudre l'intrigue, de cheminer vers le dénouement
5 Situation finale : retour au calme, histoire finie.
Bon, après, dans un roman, il peut y avoir plusieurs schémas narratifs qui se suivent, s'entremêlent etc.

Ce schéma fonctionne très bien et permet à presque tout le monde d'écrire au moins une nouvelle.


C'est ce que j'enseigne à mes 6èmes chaque année lorsque je leur demande en rédaction d'écrire un conte mythologique explicatif.
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Toonnette
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MessagePosté le: Dim Mar 07, 2021 11:02 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Ce sont les bases pour écrire une bonne histoire, facilement compréhensibles et faciles à mettre en œuvre *Smile*

La méthode Truby a pour avantage de pousser les réflexions très loin avant de se jeter dans la rédaction et l'écriture.
C'est hyper intéressant à étudier. Pour écrire une petite histoire des schémas plus simples sont plus efficaces, surtout face à des élèves.
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MessagePosté le: Mar Mar 09, 2021 7:27 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Toonnette a écrit:
Pour le "Show, don't tell" cela commence à être martelé un peu partout

C'est le mode de narration majoritaire depuis un siècle. Donc, l'info a fini par transpirer


Toonnette a écrit:
le "show don't tell" est très long à maîtriser

Oui. Comme dit plus haut, entrelacer les émotions du protagoniste dans un évènement décrit en direct, montrer les émotions, leur donner une dynamique naturelle dans le timing d'une scène, c'est plus de travail qu'un monologue vite torché.. D'un autre côté, ce n'est pas négociable. La personne qui veut écrire des récits prenants doit être prête à fournir le travail nécessaire.
Donc le titre de ce fil de discussion n'aurait pas pu être mieux choisi.
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