Prix unique des livres : les professionnels en émoi
NOUVELOBS.COM | 30.05.2008 | 18:04
Malgré "l'attachement" de la ministre de la culture, Christine Albanel, à la loi de 1981 sur le prix unique du livre, le projet de loi sur la modernisation de l'économie prévoit d'autoriser les rabais supérieurs à 5% au bout d'un an (au lieu de 2). Non consultés, les professionnels s'inquiètent.
Les milieux du livre restent en émoi après les tentatives de certains députés de la majorité, repoussées en commission, de remettre en cause la loi Lang de 1981 sur le prix unique du livre.
La ministre de la Culture Christine Albanel a souligné jeudi 29 mai "son attachement" à cette loi, "un des piliers de la politique du livre". La ministre a ajouté qu'elle n'en était "pas moins ouverte à une discussion sur la modernisation" de la loi. La discussion pourrait avoir lieu dans le cadre du Conseil du livre qui doit être prochainement installé.
Dans le cadre du projet de loi sur la modernisation de l'économie (LME), qui va être débattu la semaine prochaine par les députés, un amendement vise à "attaquer la Loi Lang" en autorisant les soldes sur les livres au bout d'un an au lieu de deux actuellement, s'alarme la Fédération interrégionale du livre et de la lecture (Fill) dans un communiqué publié vendredi.
"Aucun débat préalable"
"Aucun débat préalable avec les professionnels n'a eu lieu. L'ensemble de la chaîne du livre, ainsi que le ministère de la Culture, se mobilise contre cette proposition. Un autre amendement, qui proposait de réduire ce délai à six mois, a ainsi pu être retiré", poursuit la Fill.
La Fill et les structures Régionales pour le Livre "font pression actuellement auprès des élus en région pour réagir rapidement", a indiqué la Fill.
Le député Nouveau Centre Jean Dionis du Séjour a l'intention de défendre en séance un amendement au texte LME afin que les détaillants soient autorisés au bout d'un an à pratiquer des rabais supérieurs à la limite de 5% fixée par la loi Lang alors qu'actuellement ils doivent attendre deux ans.
Les auteurs, les éditeurs et les libraires ont demandé le retrait de cet amendement sur les soldes de livres. Dans un communiqué en date du 22 mai, le SNE (Syndicat national de l'Edition), le SLF (Syndicat de la Librairie française) et la SGDL (Société des gens de lettres) ont déploré "ces tentatives de déstabilisation du marché du livre qui seraient ruineuses et irrémédiables pour l'économie du livre et pour la culture".
Mais qui veut la mort de la loi Lang ? Le consensus autour de ce texte, qui a instauré le prix unique du livre en France, voté à l'unanimité en 1981, pris depuis comme modèle à l'étranger et volontiers qualifié de "première loi de développement durable", semble aujourd'hui s'effriter à la faveur du projet de loi de modernisation de l'économie (LME), dont l'examen doit commencer, jeudi 29 mai, à l'Assemblée nationale.
Pourtant, la remise en cause de cette loi ne figurait dans le rapport Attali remis en février pour libérer la croissance. Mieux, alors que Michel-Edouard Leclerc s'en étonnait, ayant peine à croire que "le "tombeur" des professions protégées ait incidemment oublié cette affaire", Jacques Attali lui avait rétorqué que la commission qu'il dirigeait et lui-même étaient "favorables au maintien de la loi Lang".
Las ! C'était sans compter l'avis de deux députés de la majorité, Christian Kert (UMP, Bouches-du-Rhône) et Jean Dionis du Séjour (Nouveau Centre, Lot-et-Garonne). Ils sont les auteurs d'un amendement au projet LME qui prévoit de réduire de deux ans à six mois le délai avant lequel il est interdit de pratiquer des rabais supérieurs à 5 % sur le prix des livres.
Cette proposition a aussitôt suscité une levée de boucliers de tous les acteurs concernés. La Société des gens de lettres (SGDL), le Syndicat national de l'édition (SNE) et le Syndicat de la librairie française (SLF) ont envoyé une lettre commune à Christine Albanel, ministre de la culture, pour la mettre en garde contre l'adoption d'un tel dispositif qui "amorcerait un bouleversement total du marché du livre, dont les seuls bénéficiaires seraient quelques grands acteurs de la distribution".
D'après eux, cela serait négatif pour l'ensemble de la profession. Les librairies indépendantes, qui emploient 13 000 salariés, "ne pourraient pas résister à l'émergence d'un marché de solde à grande échelle dans les grandes surfaces comme sur Internet" ; de plus, "les éditeurs pâtiraient directement d'un report des achats de nouveautés dans l'attente des soldes" ; en ce qui concerne les écrivains, "le système envisagé ne profiterait qu'aux auteurs de best-sellers".
ACHETER PLUS DE LIVRES
Restent les consommateurs. En entraînant une baisse du prix des livres, cette mesure devrait permettre aux clients d'acheter plus de livres. "Nos clients trouvent que les livres sont chers", explique Xavier Garambois, directeur général d'Amazon France, qui juge "très positive" l'initiative des deux députés. "Cela stimulerait le marché du livre, qui est moins dynamique en France qu'en Grande-Bretagne et où les nouveautés sont moins chères", poursuit-il.
Surtout, après la décision rendue le 6 mai par la Cour de cassation qui a estimé que la gratuité des frais de port, pratiquée par les libraires en ligne comme Amazon ou Alapage, n'était pas illégale et ne constituait pas une concurrence déloyale par rapport aux librairies traditionnelles ; cette nouvelle offensive vient à point nommé pour conforter les positions du géant américain.
Les livres sont-ils trop chers en France ? La question est posée. "La loi sur le prix unique est la pierre angulaire de la vie éditoriale. Elle n'empêche pas la concurrence et ne lèse pas les consommateurs", avertit Antoine Gallimard. Provocateur, Hervé de La Martinière estime que "les livres ne sont pas assez chers", si on considère le travail fourni par l'écrivain, l'éditeur, voire le temps passé à lire un livre au regard du coût d'une place de cinéma.
"Le prix du livre est resté constamment inférieur à l'inflation, sauf en 1981, rappelle Guillaume Husson, délégué général du SLF, pour qui "la suppression de la loi Lang entraînerait une explosion du prix des livres". Quant à l'exemple britannique, il est honni. La suppression du prix unique en 1995 a entraîné, selon les professionnels du livre, "des livres en moins grand nombre, plus chers et moins accessibles ; le consommateur, contrairement aux idées reçues, à tout à perdre à cette dérégulation".
Malgré ce climat, Jean Dionis du Séjour persiste et signe. Il a décidé de maintenir en séance l'amendement, qui a été rejeté en commission, tout en le modifiant légèrement : le délai pour autoriser les rabais passerait de deux ans à un an. Cette mesure devrait permettre, selon lui, de "réduire le nombre extrêmement élevé de livres invendus qui sont détruits chaque année en France", qu'il évalue à "environ 100 millions". Un argument jugé digne d'un "évadé de l'asile de Charenton" par Teresa Cremisi, PDG de Flammarion.
Alain Beuve-Méry
ouvelle offensive
contre le prix unique du livre
Marie-Laetitia Bonavita
30/05/2008 | Mise à jour : 11:20 |
Les libraires indépendants craignent l'émergence d'un marché des soldes dans les grandes surfaces et sur Internet. Crédits photo : Le Figaro
Un député Nouveau Centre veut réduire de deux à un an le délai durant lequel les soldes de livres sont interdits.
Le monde de l'édition est en ébullition, avec l'offensive parlementaire contre la «sacro-sainte» loi Lang de 1981 sur le prix unique du livre. Le député Nouveau Centre (Lot-et-Garonne) Jean Dionis du Séjour a bien l'intention de demander la semaine prochaine, dans le cadre de l'examen du projet de loi sur la modernisation de l'économie (LME), la réduction de deux ans à un an du délai durant lequel les soldes (rabais supérieurs à 5 %) de livres sont interdits.
De fait, le député persiste et signe. Il est avec Christian Kert, député UMP des Bouches-du-Rhône, à l'origine d'un amendement au projet LME qui prévoyait de limiter à six mois l'interdiction des soldes des livres. Cet amendement a été rejeté la semaine dernière en commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale. Christian Kert a décidé de ne pas le représenter, mais de lancer une table ronde à la rentrée autour du prix du livre.
Jean Dionis du Séjour, lui, récidive au prix toutefois d'un adoucissement de sa proposition. Car son amendement a suscité une levée de boucliers dans les milieux de l'édition. Dans un communiqué commun publié la semaine dernière, la Société des gens de lettres, le Syndicat national de l'édition et le Syndicat de la librairie française ont mis en garde contre «la fin du prix unique du livre» et à sa clé «un bouleversement total du marché du livre».
Préoccupation écologique
Selon eux, les conséquences d'une dérégulation du marché de livre seraient pénalisantes pour tous les acteurs de la filière. Les libraires indépendants, déjà fragiles économiquement, résisteraient difficilement à l'émergence d'un marché des soldes dans les grandes surfaces et sur Internet. Les éditeurs pâtiraient directement d'un report des achats des nouveautés dans l'attente des soldes. Les lecteurs souffriraient, quant à eux, d'un appauvrissement de l'offre éditoriale et surtout d'une augmentation du prix du livre, les éditeurs compensant le manque de recettes lié aux soldes par une augmentation globale de leurs prix.
Ces arguments ne semblent guère convaincre Jean Dionis du Séjour dont la priorité est avant tout écologique. Figurant parmi les cinq députés qui ont participé cet automne au «Grenelle de l'environnement», le parlementaire veut réduire le nombre de livres invendus qui sont détruits chaque année, soit entre 80 à 100 millions sur un total de 400 millions exemplaires. Un gâchis non seulement économique, mais également écologique. Si l'amendement a peu de chances d'être voté, il aura au moins le mérite d'avoir lancé le débat, reconnaît-on dans l'entourage du député.
Bon, désolée pour le pavé !
Sinon pour le débat, je suis pour le maintient du prix unique du livre, c'est tout de même grâce à la loi Lang que certains éditeurs ont réussi à survivre et si ce texte de loi venait à passer, ça serait la fin pour les éditeurs de petite taille... Et je refuse de n'avoir comme choix dans mes rayons de librairie que les derniers auteurs à la mode (que je trouve la plupart du temps d'un ennui mortel). _________________ On ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux Faites que le rêve dévore votre vie afin que la vie ne dévore pas votre rêve.
Inscrit le: 30 Juin 2004 Messages: 5671 Localisation: Physiquement : Cergy, France. Mentalement : MIA
Posté le: Mer Juin 04, 2008 3:50 pm Sujet du message:
Pareil, j'espère que la Loi Lang ne sera pas abrogée...
Mais si ça pouvait arrêter les éditeurs-escrocs comme Pygmalyon, ça ne serait pas un mal (l'un n'empêche pas l'autre ^^) _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman
Posté le: Mer Juin 04, 2008 4:28 pm Sujet du message:
C'est vrai que ce serait la mort des petits libraires...D'un autre côté, avec Alapage et Amazon, on aurait des chances de payer moins cher nos livres.
Ceci dit en en Belgique le prix du livre est plus ou moins libre et les livres sont plus chers qu'en France, même en grandes surfaces.
Inscrit le: 08 Mai 2003 Messages: 2599 Localisation: Lille
Posté le: Mer Juin 04, 2008 6:18 pm Sujet du message:
Je suis carrément pas convaincue que ça pourrait aider. Ca va juste creuser le fossé entre les petites structures et les monstres aussi bien dans l'édition que pour les librairies.
Il faudrait réfléchir à une autre solution que de détruire ces livres. _________________ Zelphalya
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