Carlota Fainberg - Antonio Munoz Molina

[clarabelle]

Les spectres sonnent toujours deux fois ...Si ce n'est le titre du roman, on pourrait s'interroger sur le rôle de Carlota Fainberg dans ce roman d'Antonio Munoz Molina. La blonde et sculpturale Carlota, fantasme d'un homme que Claudio, narrateur de l'histoire, a rencontré par hasard dans un aéroport de Pittsburgh. Tous deux, Claudio et Marcelo, sont bloqués pour plusieurs heures pour cause de tempête de neige. L'un part en colloque à Buenos Aires et l'autre s'envole à Miami pour affaires. Mais cette destination argentine éveille en cet homme qu'il rencontre pour la première fois une nostalgie violente et contagieuse. Car Marcelo est homme que Claudio juge intérieurement un espagnol vulgaire, fruste et prétentieux. Lui, l'éminent professeur d'université... Pourtant, c'est son regard d'homme prétendument cultivé et supérieurement intelligent qui critique le système nord-américain auquel il appartient, mais rejetant paradoxalement la vieille garde espagnole. Mais l'effet de boomerang ne se fera pas attendre. Son poste lui passera sous le nez, sous prétexte de justement trop appartenir au "vieux machisme espagnol".
Claudio est un homme dépité, lui qui juge ce compatriote "tellement cheap pour dire les choses crûment" et qui pense s'être adapté aux "rites et à la réserve de l'étiquette universitaire nord-américaine", il est étonné d'être finalement identifié "aussi vite comme un des ses compatriotes, (...) c'était que je partageais peut-être, sans m'en rendre compte, quelque chose de sa vulgarité, de sa brutale franchise espagnole." . Et Claudio en est là : il n'est pas celui qu'il pensait être et c'est d'une certaine façon ce Marcelo qui va lui ouvrir les yeux.Parce que Marcelo lui raconte sa vie et sa rencontre bouleversante avec une femme fabuleuse du nom de Carlota Fainberg. Oui, elle arrive enfin !! C'est presque à mi-parcours du récit qu'elle apparaît enfin dans ce roman. Une très lente introduction à cette relation sulfureuse que Claudio tente d'excuser (ou plutôt l'auteur d'argumenter) en accusant la volubilité de Marcelo.Bref, lors d'un voyage ordinaire à Buenos Aires, Marcelo descend à l'hôtel Town Hall, "une espèce de musée archéologique de l'hôtellerie du vingtième siècle". Sa chambre au quinzième étage, l'ascenceur à commande manuelle, une vieille camériste un peu fouineuse, un réceptionniste avec des cheveux blancs, des employés en uniforme gris... L'ambiance résonne étrangement d'un autre temps et dans cet univers surréel apparaît la sublime Carlota, blonde, grande et voluptueuse. L'homme succombe à son invitation dans la suite nuptiale et suivent deux jours de torride passion. Car survient l'épouse de Marcelo au bout de ces deux jours... Lui prend ses distances tandis que Carlota rit de lui -son mari est le directeur de l'hôtel et se doute de ses incartades.
L'histoire entre Marcelo et Carlota se résume à une partie de jambes en l'air, mais aussi longtemps cette femme hantera l'esprit de l'homme. Longtemps il croira l'apercevoir au détour d'un aéroport ou ailleurs sur la planète... mais elle, Carlota, restera ce souvenir impérissable de Buenos Aires.
Sans le savoir, Claudio (l'universitaire mal dans sa peau) va suivre les traces des amours de Carlota et Marcelo. A Buenos Aires, le blues va le saisir. Il va louper son intervention sur le poème de Borges. Et découvrir toute la vérité sur Carlota Fainberg.Mais avant d'en arriver là, comme le chemin semble long !! L'auteur prétend avoir écrit un roman court (187 pages) mais son sujet paraît terriblement brouillon, un condensé de beaucoup de choses en peu de pages... Dommage. Et cet américanisme persistant, ces mots américains glissés dans le récit du narrateur, tendent à peser le style. Antonio Munoz Molina m'avait enchantée avec "En l'absence de Blanca", mais il peine à retenir mon attention avec "Carlota Fainberg".
Roman confus et dispersé pour une trame romanesque qui s'égare à maintes reprises, "Carlota Fainberg" serait presque décevant.CARLOTA FAINBERG chez Amazon.fr
Clarabelle,