Globalia - Jean-Christophe Rufin

[L]

Globalia représente le système démocratique mondial parfait. Les frontières ont été abolies, un minimum prospérité existe pour tous, et avant tout, la sécurité est préservée. Les dômes de verre sont peu visibles et protègent efficacement les globaliens des non-zones, où trainent terroristes et autres asociaux.
"Liberté, sécurité, prospérité" est la devise de ce magnifique système où une paix continuelle règne, et où tout le monde se doit d'être heureux.
Pourtant, certaines personnes telles que Baïkal trouve à redire, certaines personne qui pour la sureté de tous, doivent être remises sur le droit et bon chemin.

édition folio, n°4230.
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Premier livre de Jean-Christophe Rufin que je lis, et premier très bon avis. Globalia est un excellent livre d'anticipation. Cela se voit au moment de la lecture, mais aussi aux moments post-lecture, quand nous retrouvons dans la vie de tous les jours ces "détails" que l'oeuvre souligne, quand le questionnement afflue sur un possible futur tel qu'il est décrit ici, quand des doutes se concrétisent et prennent un visage grimaçant là où on aurait pû en attendre un souriant. Globalia est un bon bouquin d'anticipation tout simplement car l'imagination pure fait place au probable et au crédible, tandis que nous nous voyons les possibles acteurs d'un tel demain.
L'oeuvre tourne autour d'un monde, qui depuis les Lumières, pourrait paraître idyllique à tout un chacun: La démocratie universelle. Une démocratie sans frontières, sans nations, sans races, sans pauvreté, sans soucis du quotidien, sans soucis du passé: Les globaliens ayant tous droit de vivre décemment et ayant tous accès à une jeunesse et une longévité de vie exceptionelle. (D'ailleurs, le temps n'a plus cours, ce qui renforce cette sensation d'immortalité).
Un système démocratique poussé à son paroxisme, qui en vient à nous questionner sur la finalité de tout idéal poussé à l'excès. A ce niveau là, Globalia se rattache à l'oeuvre de Tocqueville (1805-1869), De la démocratie en Amérique, qui fut surement aussi une source d'inspiration. Précurseur éclairé et historien-philosophe Alexis de Tocqueville voyait les possibles limites du système démocratique dans, principalement, la dictature de la majorité.
Car en Globalia, l'excès est consommé, et on vend du bonheur à des peuples gavés chaque jour à la futilité, à l'aveugle insouciance et, bien entendu pour toute bonne Démocratie, à la peur. Les médias télévisuels s'imposent comme la religion universelle, les gens passent la réflexion, le travail sur soi et son environnement en mode stand by. On formate tout, et on est heureux. Oui, surtout, on est HEUREUX.

Mais ce n'est pas le cas de Baïkal, personnage principal du bouquin, rebelle forcené que ce système trop propre exaspère, et qui voit dans les dômes de verres limitant Globalia autant de murailles à la Liberté. Ce personnage est attachant et est à l'image du révolutionnaire utopique qui serait prêt à mettre sa vie en jeu pour son Idéal.
Il est accompagné de Kate, sa petite amie, qui elle place l'amour avant tout et agit guidée par la passion.
Le troisième et dernier personnage important est Puig Pujols, journaliste encré en Globalia qui au fil des pages comprendra son monde et tentera de s'en extirpé. Un personnage très interessant, surement celui qui m'a le plus plu, car faisant réellement un effort de réflexion.
En effet, Baïkal est rebelle par une recherche de liberté presque instinctive, comme un animal qui se sentirait piégé en Globalia, tandis que Kate est aveuglée par l'Amour et ne semble agir que pour être avec Baïkal.
D'ailleurs, Globalia est aussi, un peu, une histoire d'amour. Je n'y ai vu que l'aveuglement absurde de celui-ci là où l'auteur a peut être voulu montrer sa force... (Le pire étant à la fin, quand le couple se rejoint dans la non-zone et décide de vivre seuls, retirés du monde. La recherche de Liberté de Baïkal est étouffé par son sentiment amoureux, et s'efface le rebelle pour laisser place à l'amoureux transit. Puig ne semble pas prendre cette route là.) Bref, je ne vois à travers cet "amour-plus-fort-que-tout" que l'hypocrisie d'un sentiment qui se complet dans l'inaction et l'aveugle espérance.

De plus, au travers de Puig Pujols et de sa recherche d'émancipation de Globalia, Jean-Christophe Rufin va faire une mise en abîme du livre, de la lecture, et de sa place au sein de l'Humanité.
En effet, le livre est garant de la mémoire du monde, dans le sens où l'écriture n'est pas un phénomène éphémère, contrairement aux médias, qui ne font office de renseignement qu'un moment, puis s'effaçent éternellement. Dans Globalia, la lecture et les livres sont interdits, et l'auteur souligne ainsi parfaitement l'importance que ceux-ci ont pour permettre l'ouverture au monde et à la réflexion. Là encore, l'écho se porte à nos jours où l'aspect télévisuel emporte tout sur son passage et relègue la lecture à un exercice de seconde zone, dont on peut hardiment se passer pour s'informer, pour s'ouvrir, pour rêver, pour penser, pour vivre.
Le bonheur aura toujours un goût amer pour celui qui doutera...et la pensée unique paraît si attrayante.

Formellement, c'est un livre très bien écrit et qui se lit excessivement facilement et rapidement (2 jours 1/2 pour les 500 pages. Surement un record pour moi qui lie tous les jours mais assez lentement). Il est découpé en cinq parties composées elles mêmes de nombreux chapitres.
On se fond dans Globalia, et on suit avec grand plaisir les destins croisés de nos personnages principaux. Sous fond de manipulation, se joue devant nous un spectacle qui pourrait être le mirroir déformant de notre présent.
Au fil des pages, les brumes de l'espoir et de l'attente disparaissent, chassées par l'implacable réalité. La fin du bouquin est puissante car révélatrice, encore une fois, je trouve.

Ainsi, je vous invite à découvrir Globalia, pour passer un très agréable moment de lecture, et pour laisser s'immiscer le doute en vous, ou lui faire prendre de nouveaux chemins.

[Turb]

Très bon livre, le seul que j'ai lu de Rufin pour l'instant. On retrouve le souffle des romans d'anticipation de la grande époque, mais réactualisé sur les interrogations contemporaines de Rufin.

Pour rejoindre L, le livre a quelque chose d'amer, peut-être de façon involontaire. Les héros essaient de sortir du système « parfait » de Globalia et pourtant l'on sent qu'il ne savent pas vraiment quoi chercher... et à la fin il est difficile de caractériser ce à quoi ils sont arrivés. Il y a effectivement ce qui est à la fois l'opposé et l'essence de Globalia, la réalité crue, qui l'emporte toujours, ce qui mène, oui, à l'inaction.

Au passage, dans les lectures possibles de Rufin (farpaitement d'accord pour Tocqueville), j'ajoute pour ma part la défaite de la pensée de Finkielkraut, en particulier sur la victoire de « ma culture » (relativisme culturel) sur « la culture » (universalisme). Sauf que chez Rufin « Ma culture », se noie dans la « société globale » et ne conserve que ses éléments dits « typiques » (au sens touristique du terme, béret et baguette), alors que pour Finkielkraut il s'agit plus d'une dénonciation morale de l'aveuglement sur certains faits traditionnels.

On notera aussi un regard étonnant de lucidité (enfin, ce qui apparaît comme de la lucidité) de Rufin sur son « métier » d'humanitaire, les manipulations qui existent et le sens de cette action.
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En cours de lecture : Le Mythe de Sisyphe, d'Albert Camus

[L]

[krys]

Un très bon roman où on trouve une critique de la société contemporaine et ses aspirations au bonheur,à l'individualisme et en même temps,paradoxalement,au conformisme... j'ai trouvé par contre, l'histoire d'amour peu crédible, elle manque de passion.
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Fantasy can become reality (Stratovarius).

[Minifred]

Pour ma part je n'ai pas tellement apprécié ce bouquin... Rufin utilise toutes les ficelles pour nous pondre un roman qui sent vraiment le réchauffé...


dsl
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"En Science Fiction, si d'autres semblent avoir atteint, depuis lors, de plus hautes cimes, c'est qu'ils sont debout sur les épaules de Wells"
[Isaac Asimov]

[Lisbeï]

[Meneldur]

Je rejoins aussi Minifred. On retrouve là-dedans des éléments de 1984 (l'idée de base) et de Fahrenheit 451 (l'abrutissement médiatique) : pas vraiment novateur, hormis peut-être sur la forme. C'est une lecture agréable, mais certainement pas aussi indispensable que ces deux-là.

[Sumac]

Un très mauvais souvenir de lecture : beaucoup de clichés, une écriture plutôt plate, une intrigue bateau. Sur la même thématique, Un bonheur insoutenable d'Ira levin est beaucoup plus réussi.

[Crazy]

Tiens, y'a quelqu'un qui me l'a conseillé, récemment, je vais peut-être me laisser tenter (si j'oublie pas )
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Crazy
Modératrice et Dictatrice Adjointe
Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman

[Crazy]

Je viens de le commencer et je le lis petit à petit (quand je vais à la gym ).

Pour le moment, c'est pas mal, ça se laisse lire, mais mon problème c'est que ça n'a pas l'air de tenir la comparaison avec "La zone du Dehors" de Damasio
Au point même que j'ai songé au plagiat en lisant les deux premiers chapitres... (ça a été écrit 4 ans après la première version de "la zone..." apparemment).

En tout cas, je compte poursuivre jusqu'au bout ^^
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Crazy
Modératrice et Dictatrice Adjointe
Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman

[Opale]

Whoo avis très inégaux ! 2 partout !

Moi j'ai adoré ! Oui, j'ai l'impression de ne pas être difficile quand il s'agit d'anticipation ! ça me passionne toujours ! Voilà quelques extraits qui m'ont particulièrement marqués :

« Globalia, où nous avons la chance de vivre, proclamait le psychologue, est une démocratie idéale. Chacun y est livre de ses actes. Or, la tendance naturelle des êtres humains est d'abuser de leur liberté, c'est-à-dire d'empiéter sur celles des autres. LA PLUS GRANDE MENACE SUR LA LIBERTE ELLE-MEME. Comment défendre la liberté contre elle-même ? En garantissant à tous la sécurité. La sécurité, c'est la liberté. La sécurité, c'est la protection. La protection, c'est la surveillance. LA SURVEILLANCE, C'EST LA LIBERTE. »
[Description de Globalia]

"Croyez-moi, un bon ennemi est la clef d'une société équilibrée"
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[Crazy]