Tome 1/2 :
Suite à plusieurs mauvaises années, la disette fait rage, tandis que les seigneurs n'hésitent pas à pressuriser encore et toujours leurs serfs pour conserver leur train de vie luxueux. A la mort du roi son père, la princesse Tilda se prépare à monter sur le trône et à effectuer les réformes nécessaires pour soulager son peuple exsangue. Hélas, un complot place sur le trône son tout jeune frère, marionnette entre les mains de personnages bien décidés à ne pas céder une once de pouvoir. Exilée, Tilda parvient à s'échapper. Soutenue par deux amis fidèles, Tankred et Bertil, elle entreprend de reconquérir sa couronne.
Dans les pas de Tilda et ses compagnons, nous découvrons un royaume où le peuple est dans la misère la plus profonde. Opprimés et désespérés, les gueux rêvent de "l'âge d'or", une légende dans laquelle les hommes vivent libres et égaux. La révolte gronde. Réprimée dans la plus grande violence par les seigneurs féodaux, qui veulent conserver leurs privilèges !
L'histoire nous évoque donc les révoltes paysannes du XIVe siècle. Et aussi des soulèvements populaires nettement plus contemporains bien sûr, le clivage entre ceux qui peinent pour survivre et ceux qui en profitent n'ayant guère évolué, mais ce n'est pas le sujet. C'est un monde brutal et cruel, excessivement sombre. Ceux qui rêvent de changer les choses - menés par l'ambivalent Hellier - et ceux qui veulent les conserver en l'état rivalisent de barbarie.
En sus de ces réflexions sur le pouvoir, la scénariste Roxanne Moreil a également donné à l'ouvrage un angle féministe, tant à travers Tilda, qui va devenir une guerrière armée à l'image de Jeanne d'Arc, que via la congrégation de bonnes sœurs de dame Abigaëlle, qui vivent en autonomie sans homme.
Aventure, politique, combats, mais aussi amitié, loyauté et sur la fin une touche de fantastique (qui devrait donner le ton du tome suivant)... Il n'y a pas forcément de grandes surprises, mais c'est dense et intéressant. Le lecteur voit à peine passer le temps, pourtant ce premier tome d'un diptyque est quand même un sacré pavé de plus de deux pages, ce qui n'est pas si courant en bande dessinée !
Il est temps maintenant de parler des dessins de Cyril Pedrosa. Des dessins comme on a peu coutume d'en voir, évoquant les enluminures des livres d'heures et les tapisseries médiévales, c'est inventif et vraiment spécial. Certains lecteurs adoreront, d'autres détesteront. Pour ma part, je suis un peu entre les deux.
J'apprécie beaucoup les paysages magnifiques, les forêts et les montagnes. J'adore les nombreuses doubles pages panoramiques soignées et envoutantes. J'aime assez la colorisation, là encore peu classique, avec des couleurs souvent assez ternes mais qui collent à l'ambiance sombre de l'histoire.
Et pourtant, j'ai aussi eu du mal avec ces dessins. Cela manque souvent de lisibilité, avec des cases qu'il faut déchiffrer plus qu'admirer car on n'y distingue pas grand chose de prime abord. Les personnages et les animaux ont des traits durs, caricaturaux, qui aident à bien les distinguer mais les rendent peu agréables à l’œil. Mais surtout, le dessinateur a choisi de faire régulièrement évoluer le(s) même(s) personnage(s) plusieurs fois au sein d'une même case, procédé inspiré des techniques médiévales. Là où une case présente une file de personnages, une douzaine de cavaliers occupant tout l'espace ou autre chose du même genre, il s'agit en fait d'un même et unique personnage qui se déplace dans le décor au fil du temps. Les cases en question semblent surchargées de personnages, alors qu'en fait il n'y en a que très peu qui sont mis en action. C'est très perturbant, même une fois qu'on a compris, et cela nécessite de passer beaucoup de temps sur chaque case concernée (pas toutes, heureusement !) pour bien comprendre ce qu'il s'y passe. Au final, c'est assez fatiguant à regarder.
Du coup, je ressors de la lecture de cette BD avec un sentiment mitigé. En la feuilletant, je l'avais trouvé très belle, mais la lecture a été laborieuse alors même que les dessins sont superbes ! Je serai cependant curieuse de découvrir la suite de cette BD résolument originale.
Prix Landerneau BD 2018, Prix BD Fnac / France Inter 2019 _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Tu aurais un exemple de page intérieure, du coup ? _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman
Et une page qui illustre le déplacement des persos au sein d'une même case ici :
_________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Inscrit le: 30 Juin 2004 Messages: 5671 Localisation: Physiquement : Cergy, France. Mentalement : MIA
Posté le: Mar Avr 23, 2019 10:05 am Sujet du message:
Merci
En effet, c'est particulier ^^ _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
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Posté le: Dim Mai 12, 2019 2:12 pm Sujet du message: Re: L'âge d'or - Pedrosa & Moreil
Soleil* a écrit:
Aventure, politique, combats, mais aussi amitié, loyauté et sur la fin une touche de fantastique (qui devrait donner le ton du tome suivant)... Il n'y a pas forcément de grandes surprises, mais c'est dense et intéressant.
Je suis entièrement d'accord avec toi. J'ai hâte de savoir comment le fantastique va évoluer par la suite.
Soleil* a écrit:
Il est temps maintenant de parler des dessins de Cyril Pedrosa.
Pour ce qui est du dessin, je partage également ton avis. En effet, les paysages, les couleurs et les dessins qui se poursuivent sur deux pages, même trois parfois sont splendides. J'ai eu du mal moi aussi avec les traits des personnages et des animaux.
En revanche, les passages où les mêmes personnages évoluent plusieurs fois sur une même planche, une même double planche ou une même case ne m'ont pas dérangé même si je reconnais que c'est assez déroutant au moins pour la première. Personnellement, je trouve que ça participe bien à l'ambiance de cette bande dessinée.
Soleil* a écrit:
Des dessins comme on a peu coutume d'en voir, évoquant les enluminures des livres d'heures et les tapisseries médiévales, c'est inventif et vraiment spécial. Certains lecteurs adoreront, d'autres détesteront.
Mon copain a regardé par dessus mon épaule et ... il a détesté d'emblée le dessin. C'est rédhibitoire pour lui.
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